La montre d’occasion en vedette chez Bucherer

L’un des plus célèbres détaillants horlogers ouvre à Genève un étage totalement dédié aux montres dites CPO “Certified Pre-Owned”. La démonstration qu’il existe bien un marché de l’occasion comme l’explique Servan Peca dans un article dans le Temps ci-dessous.

Dans un monde normal, on utiliserait le terme «seconde main».
Mais dans l’univers du poignet, on lui préfère l’appellation CPO pour
«Certified Pre-Owned Watches».
Montres certifiées et préalablement possédées? Montres qui continuent leur vie? Montres portées? Même les responsables de Bucherer ne savent pas comment traduire l’acronyme. En revanche, le détaillant horloger sait très bien ce qu’il veut faire d’un segment de la montre d’occasion en pleine
croissance.
Mardi à Genève, le groupe lucernois inaugurait un étage entièrement
dédié aux CPO. Rolex, Cartier, Zenith, Panerai, Carl F. Bucherer, Audemars Piguet, Omega… De quelques milliers à
plusieurs dizaines de milliers de
francs, les prix des montres exposées
sont très variés. Et en principe,
ils sont moins élevés que
ceux des modèles neufs. La différence
moyenne, Guido Zumbühl,
le directeur général de Bucherer,
ne la connaît pas. «C’est très
variable en fonction de l’offre et
de la demande pour chaque
modèle. Parfois, mais c’est exceptionnel,
certains modèles déjà
portés sont même plus chers.»
Mettre de l’ordre
Cette ouverture, dans la prestigieuse
rue du Rhône, est un symbole
de ce que devient le CPO.
Avec Bucherer, le marché de
seconde main acquiert une nouvelle
légitimité, estime le directeur
commercial, Patrick Graf:
«Le fait que nous entrions dans
ce marché constitue un grand
changement pour le secteur.» Le
groupe, armé de son organisation,
de sa centaine de boutiques, de
son réseau de marques et de sa
réputation, pourrait aussi contribuer
à faire de l’ordre dans un
segment où se mélangent – généralement
sur internet – importations
parallèles, vraies montres
d’occasion et contrefaçons.
Pour le CPO, le premier tournant
a eu lieu l’an dernier déjà.
Deux transactions ont dénoté un
changement de perception dans
le milieu horloger: le rachat du
détaillant américain Tourneau
par Bucherer et celui de la plateforme
internet britannique
Watchfinder par le groupe genevois
Richemont. «Nous ne disposons
pas de chiffres exacts, mais
ce marché a un énorme potentiel,
affirme Guido Zumbühl. Il y a déjà
différents acteurs présents, mais
ce sont surtout des petites structures
avec une présence uniquement
en ligne. La plupart d’entre
eux n’ont pas de points de vente.»
L’activité est légèrement moins
rentable que le marché du neuf,
compare le directeur général.
«Mais si l’on va au-delà des simples
chiffres, le CPO nous apporte une
nouvelle clientèle, plus jeune, ainsi
que des collectionneurs ou des
amateurs de vintage. Ils entrent
dans notre base de données et
nous pouvons les fidéliser.»
Estimer mais pas négocier
Après Genève, Bucherer a déjà
prévu de multiplier les points de
vente pour le CPO; Zurich, Hambourg,
Londres et Paris. A la rue
du Rhône, le nouvel espace se
situe au quatrième étage de l’immeuble
qui abrite déjà la boutique
de Bucherer. Soit juste au-dessus
du troisième, où sont regroupés
le service après-vente et l’atelier
de réparation. Car l’enjeu du CPO
n’est pas seulement de séduire de
nouveaux clients. Il s’agit aussi,
en amont, de trouver des montres
à racheter et, donc, de pouvoir
faire une offre aux vendeurs.
Bucherer s’engage à le faire en
trente minutes chrono. «Nous
savons que lorsque quelqu’un
nous approche, il a déjà une idée
assez précise de ce que peut valoir
sa montre, indique Patrick Graf.
De notre côté, nous avons l’expertise
pour réaliser une estimation
qui nous semble juste.»
Autrement dit, il n’y aura pas de
fastidieuses négociations. Bucherer
brise certes un tabou horloger,
en misant haut et fort sur les
montres d’occasion. Mais il n’est
pas encore prêt à devenir marchand
de tapis.

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